Le Devoir, Montréal, Mercredi, le 13 mars 2002, page A3.

Le dernier recensement de Statistique Canada confirmes les pires craintes: exode des jeunes et désintégration des régions.


L'exode régional se confirme

Montréal a endigué la fuite de ses citoyens

VALÉRIE DUFOUR


Le recensement de 2001 vient encore une fois d'enfoncer le clou: la tendance démographique est toujours à l'exode régional au Québec. Pendant ce temps, la région métropolitaine de Montréal offre un surprenant taux de croissance de sa population, soit 3 %, qui annonce le ralentissement des déménagements vers les villes de banlieue.

Dans six régions administratives du Québec, la population diminue à un rythme important Tel est le cas de la Gaspésie-Iles-de-la-Madeleine (chute de 7,8 %), de la CôteNord (-5,4 %), de l'Abitibi-Témiscamingue (-5,1 %), du Saguenay-Lac-Saint-Jean (-2,9 %), du Bas-Saint-Laurent (-2,6 %) et de la Mauricie (-2,3 %). En tout ce sont 41335 personnes qui ont quitté ces régions pour d'autres cieux en cinq ans.

« On remarque que ce sont des régions qui se concentrent sur l'extraction de ressources, que ce soit les mines, la forêt, l'agriculture ou la pêche», souligne Marc-Urbain Proulx, professeur au département des sciences de l'économie et de l'administration de l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Or ces secteurs ne créent plus d'emplois car on utilise de plus en plus la technologie pour extraire les ressources naturelles.»

M. Proulx donne en exemple l'industrie de l'aluminium. « Au Saguenay, on produit deux fois Plus de lingots qu'il y a 20 ans. Pourtant, on a perdu le tiers des emplois qui étaient reliés au secteur» Sans emploi, les gens cherchent ailleurs, tentent leur chance dans le secteur tertiaire. Sils ne trouvent pas, ils partent Et le bilan de la population d'autres régions s'enrichit

Ainsi, la région des Laurentides affiche le taux de croissance le plus élevé du Québec avec 6,9 %. A elles seules, Blainville et Mirabel présentent un taux de croissance de leur population de 20 %, soit une hausse de plus de 11000 habitants pour les deux municipalités. A ce tableau positif, il faut ajouter les régions de Laval (3,8 %) et de Lanaudière (3,6 %), l'Outaouais (2,6 %), l'Estrie (2,5 %), Montréal (2,1 %), le Centre-du-Québec (1,7 %) et la Montérégie (1,6 %).

Pour Montréal, cette donnée a du poids. « La croissance démographique observée entre 1996 et 2001 pour la Communauté urbaine de Montréal et la Ville de Montréal (anciennes limites) est la plus significative au cours des 30 dernières années», souligne Statistique Canada.

En cinq ans, la croissance démographique en nombre d'habitants du Montréal métropolitain a été plus importante que dans l'ensemble des régions québécoises. Cela signifie que la région métropolitaine s'est enrichie de 99 903 âmes pendant que les autres régions accueillaient au total 98 684 personnes de plus. Si bien qu'aujourd'hui, 47,3 % de la population du Québec gravite autour de la métropole.

« Au Québec, les chiffres sont inquiétants surtout pour les régions éloignées puisque la croissance de Montréal est positive», croit Josée Martel, démographe au bureau régional du Québec de Statistique Canada. «Sur Ille de Montréal, on n'a jamais vu une croissance aussi significative depuis 1971. Vu le solde interprovincial négatif, il n'y a pas beaucoup d'explications possibles : cette croissance de Montréal est probablement due à l'arrivée de gens des autres régions du Québec. »

C'est également l'avis du démographe et économiste Georges Matthews, auteur du rapport intitulé Avenir démographique de la région métropolitaine de Montréal de 1996 à 2021, remis à la commission Nicolet « Si on exclut la région montréalaise, la population québécoise n'a pas crû depuis 1996 alors que nous affichons encore un nombre de naissances plus élevé que le nombre de décès. A cela, il faut ajouter que notre solde migratoire est négatif Il a donc fallu compenser le surplus de départs par des arrivées en provenance du reste du Québec. C'est la seule explication. »

Ce qui attire surtout l'attention de Georges Matthews, c'est la population de lfie de Montréal. «Elle est de 10 000 personnes plus élevée que ce que nous avions prévu, et celle des villes de banlieue est de 24 000 personnes de moins. » La couronne nord affiche toujours un taux de croissance de 5 %, et la couronne sud, de 3 %, niais cela démontre un ralentissement très net de l'exode vers la banlieue, selon l'expert.

Ainsi, bon nombre de Montréalais ont fait le choix de rester en ville. «Il y a toujours des gens qui quittent, mais leur nombre est plus faible. On peut presque pressentir un moment où l'exode s'arrêtera.»

Population, villes du Québec

 

2001

1996

Variation en %

Baie-Comeau

28940

31 795

-9,0

Drummondville

68451

65119

5,1

Matane

16249

17118

-5,1

Ottawa-Hull (partie au Oc)

257568

247072

4,2

Québec

682757

671889

1,6

Rimouski

47688

48104

-0,9

Rouyn-Noranda

36308

39 096

-7,1

Saint-Georges

28127

26584

5,8

Sherbrooke

153811

149569

2,8

Trois-Rivières

137507

139956

-1.7

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Dernière mise à jour de cette page le Dimanche 06 avril 2003 16:43
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue